Indemnités chômage: l’Europe modifie les règles pour les frontaliers
Wladimir Garcin-Berson Il y a 3 heures
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D’après les nouvelles règles, un chômeur français qui travaillait dans une nation frontalière sera pris en charge par l’assurance-chômage du pays d’emploi. La réforme pourrait faire économiser des centaines de millions d’euros à l’Hexagone.
© FREDERICK FLORIN/AFP Les travailleurs frontaliers représentaient un surcoût de 708 millions d’euros en 2017 pour la France.
Quelques semaines après l’échec des négociations autour de l’assurance-chômage, le gouvernement pourrait finalement parvenir à faire des économies grâce à Bruxelles. Ce mercredi, les instances européennes (la Commission, le Conseil et le Parlement) ont négocié un accord modifiant les règles en matière de prestations chômage et familiales pour les travailleurs frontaliers, appelés «travailleurs mobiles» par les élus européens, révèle Les Échos. Jusqu’ici, un citoyen français travaillant dans un pays étranger était pris en charge par l’Unédic en cas de licenciement, et ce même s’il avait versé des cotisations dans le pays où se situait l’entreprise. Les travailleurs ne pouvaient être couverts que par la législation d’un seul pays à la fois, et payaient des cotisations dans un seul pays également. Dorénavant, l’État membre dans lequel il aura travaillé deviendra responsable du versement des allocations chômage, selon ses propres règles et sans appui financier du pays de résidence.
Le nouveau cadre vise également à accélérer la transmission d’informations entre les États membres afin de garantir l’accès des travailleurs à la sécurité sociale, ainsi que pour lutter contre la fraude. Il devrait bénéficier aux 1,1 million de travailleurs frontaliers comptabilisés par Eurostat dans l’Union.
Un surcoût important pour la France
La Commission européenne souhaitait mettre en place une réforme «équilibrée, facilitant la libre-circulation des travailleurs et protégeant leurs droits, tout en renforçant les outils» permettant de lutter contre la fraude. Bruxelles comptait également renforcer les liens entre le lieu de travail et le lieu où les prestations sont réclamées par la suite, «en assurant une répartition financière équitable des charges entre les États membres». Une réforme accueillie favorablement par la Confédération européenne des syndicats (CES) qui a «accepté de rendre le pays d’emploi (et des contributions à la sécurité sociale) responsable du versement des allocations chômage» aux travailleurs frontaliers.
Portée par l’eurodéputé français Guillaume Balas, la réforme a été soutenue par l’Hexagone, qui y voit l’opportunité de réaliser d’importantes économies. D’après les derniers rapports de l’Unédic, les travailleurs frontaliers représentaient en effet un surcoût de 708 millions d’euros pour la France en 2017. Ce dernier n’a cessé d’augmenter ces dernières années, passant de 518 millions d’euros en 2013 à plus de 700 millions en 2017. Les trois-quarts de ces surcoûts sont imputables à la Suisse, où travaillent la majorité des travailleurs frontaliers, contre 13% au Luxembourg, 8% en Allemagne et 6% en Belgique.
Les limites d’une réforme contestée
Pour Guillaume Balas, membre du mouvement de Benoît Hamon Generation.s, cette réforme permettra une «sécurité sociale renforcée pour les travailleurs en Europe»: les changements «renforceront les instruments permettant de traiter les éventuels abus», et «amélioreront la coopération entre les États membres» de l’Union. Pour être validée, la réforme devra maintenant être présentée puis votée par le Parlement européen, avant la fin de la législature actuelle, fin juin. Elle devrait finalement être appliquée à partir de 2021.
Pour autant, plusieurs manquements ont été pointés du doigt. La Suisse n’est pas encore comprise dans la réforme, celle-ci ne touchant que les pays membres de l’Union. De plus, les travailleurs frontaliers eux-mêmes pourraient y perdre, le régime français d’assurance-chômage étant particulièrement avantageux par rapport à ses semblables européens, en termes de compensation comme de durée. Enfin, les chômeurs seront pris en charge par les administrations nationales, par exemple en Espagne ou en Allemagne, et ils pourraient se heurter à des problèmes de communication s’ils ne parlent pas l’anglais ou la langue du pays concerné. Le Luxembourg n’est également pas prêt pour cette réforme, faute d’infrastructures suffisantes, et a donc obtenu un délai de sept ans pour s’adapter.